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Tuesday, March 4, 2008
La ferme de la Société Meunière et Avicole du Gabon (SMAG), créée en 1968, avait connu des difficultés en 1995-1996 du fait de la levée de protection douanière au sein de l’UDEAC et de la concurrence du secteur informel. Elle a cependant su maintenir et développer son activité avec une production de 32 millions d’œufs par an. Quelques élevages privés de taille moyenne subsistent dans la périphérie des grandes villes, comme la Ferme du Paradis de Jacky Cochon, bien connu des librevillois. Le secteur du petit élevage privé semble en revanche susciter un intérêt croissant à la périphérie de Libreville, où plus d’une quarantaine d’élevages ont été recensés produisant 17 millions d’œufs par an, et vendant 300 T de viande par an (poules pondeuses de réforme), une dizaine d’éleveurs vendent environ 200 T de poulets de chair par an. Un programme de l’ONG Vétérinaires Sans Frontières vise à développer l’élevage de gibier de brousse (aulacodes : rongeur aussi appelé “agouti“, consommant pour 80% des fourrages, ainsi que des tubercules et des céréales). Il aide l’établissement d’éleveurs privés. Ces productions, qui sont un appoint non-négligeable au revenu des agriculteurs et devraient réduire les prélèvements d’animaux sauvages protégés, ne représentent que de faibles quantités comparées aux besoins d’une ville d’un demi million d’habitants.Une alternative aux surgelésJeter un œil sur un livre de recettes de cuisine gabonaises suffit à comprendre qu’en dehors de la pêche, la seule viande traditionellement consommée au Gabon est le gibier. L’élevage est relativement nouveau au Gabon. L’omniprésence de l’argent du pétrole à longtemps laissé croire que les Gabonais n’avaient pas à se compliquer la vie à investir dans le secteur de l’agro-alimentaire, source d’emplois physiques et contraignants, l’importations de denrées des pays voisins ou plus lointains réglant définitivement le problème. Hélas, l’accroissement des villes et la baisse des revenus traditionnels a changé la donne. Il faut maintenant compter ses sous au pays, et les produits importés coûtent trop cher pour beaucoup de Gabonais. À défaut de créer de véritables élevages industriels, il faut maintenant trouver des solutions efficaces pour nourrir la population de Libreville en améliorant petit à petit l’autosuffisance alimentaire du pays. Le gibier ne peut pas être chassé en quantité suffisante, sauf à détruire irrémédiablement l’atout maître du Gabon pour les années à venir, sa diversité biologique. De plus, l’irruption de la fièvre hémorragique Ébola rend suspecte une grande partie de la viande de brousse. Face aux faillites des grands projets de fermes d’état, il ne reste qu’à développer les petites unités de production privées, à proximité des grands centres urbains, l’état catastrophique des moyens de transport interdisant une production trop centralisée de viande fraîche.Mais là aussi, les mauvaises habitudes ont la vie dure. Dans le contexte périurbain de Libreville, le profil prédominant du candidat éleveur est celui du cadre d’entreprise ou du haut fonctionnaire. Ces candidats ne désirent pas effectuer eux-mêmes les travaux d’installation et de fonctionnement de l’élevage. Ils engagent et rémunèrent une personne à cet effet. Tout juste peuvent-ils assurer une surveillance plus ou moins rapprochée. Le personnel engagé est rarement aussi motivé que le “financier“ et la qualité de l’élevage s’en ressent toujours. Les causes sont diverses : salaires peu élevés ou non versés, mauvaises conditions d’habitation, manque de matériel, fourrage éloigné, etc. Les départs précipités sont fréquents et un élevage non entretenu, même durant quelques jours, subit des pertes inévitables. Les raisons pour lesquelles ces “financiers“ se lancent dans ce type d’élevage ne sont pas toujours les plus garantes de sa réussite : prestige, politique, assurance-retraite, amour des animaux, etc. Les objectifs d’autoconsommation et de rentabilité ne viennent qu’en dernière position. Dans ces conditions, la rigueur obligatoire et quotidienne dans la gestion de l’élevage fait défaut. Le manque d’expérience et de tradition en matière d’élevage organisé pèse lourd et une formation accélérée ne compense pas cet handicap. En clair, ce n’est pas demain que le Gabon produira la viande qu’il consomme. Pourtant, de nombreux signes permettent un peu d’optimisme à moyen terme : les petits éleveurs, souvent aussi agriculteurs, se multiplient autour de Libreville, avec l’aide d’organismes dynamiques comme l’IGAD ou d’ONG comme Vétérinaires Sans Frontières. Surtout, l’idée d’élevage de gibier fait son chemin. Déjà, quelques exploitations d’aulocodes (ou Agouti) voient le jour et des essais sur des espèces sauvages comme le Porc Épic ou le phacochère semblent prometteurs. Tout comme l’agriculture et la pisciculture, l’élevage entre doucement dans les mentalités gabonaises, se heurtant toutefois à des problèmes de financement, car démarrer une activité agro-alimentaire demande un investissement élevé, de formation et de main d’œuvre compétente. La Ferme du Paradis Partant d’une fabrique de brique au Cap Santa Clara, Jacky est aujourd’hui éleveur, charcutier et restaurateur, connu de tous à Libreville sous le nom de Jacky Cochon.«Tout à commencé lorsque j’ai construit ma première porcherie avec l’aide de copains, à partir de briques réformées, celles que je ne pouvais pas vendre. Dans un premier temps, j’élevais des cochons pour le plaisir. Il finissaient en festin deux ou trois fois par an avec la famille et les copains qui m’avaient aidé à construire les boxes. Les cochons se reproduisaient bien et vite.. J’ai donc commencé à agrandir la porcherie, puis j’ai cherché des débouchés à la viande car il fallait tout de même amortir un peu le coût de l’élevage, la nourriture surtout. Les boucheries de la place me proposaient des prix trop bas pour me permettre d’être rentable. Alors j’ai décidé de vendre en direct : j’ai développé le “Panier Ménage“, un demi cochon découpé et livré à domicile. Un ami cuisinier m’a appris à faire le jambon, puis les différents pâtés... J’apprenais à gérer un élevage de cochons de plus en plus important et, en même temps, à transformer la viande en charcuterie de plus en plus évoluée. Jusqu’au jour où j’ai pris la décision d’ouvrir ma propre charcuterie : la charcuterie Ikasa (Le Marché). Puis un peu plus tard, la “table de casse-croûte“ que j’avais installé dans la charcuterie est devenue un restaurant, mitoyen de la charcuterie. Maintenant, je gère trois entités distinctes : La Ferme du Paradis, la charcuterie Ikasa, qui fait aussi traiteur, et le restaurant Chez Jacky.»Lorsque Jacky raconte comment il est devenu le spécialiste du cochon à Libreville, tout semble simple et évident. Mais cette souriante modestie cache un énorme travail d’éleveur puis de charcutier. Ses premiers cochons étaient une race locale, produisant des animaux de 40 à 50 kg. Cela posait un réel problème de rentabilité : un cochon de 50 kg coûte cher à nourrir et a soigner mais produit très peu de viande. Malgré l’aide active de l’IGAD (Institut Gabonais d’Appui au Développement), il fallait construire les bâtiments, se former aux techniques d’élevage, acheter des animaux destinés à la reproduction, acheter les aliments, payer l’eau - un cochon en consomme 100 litres par jour - et les employés. Les petits cochons locaux ne permettaient pas d’attendre un seuil de rentabilité suffisant. Il lui a donc fallu faire venir des cochons d’Europe (puis dans un second temps pratiquer l’insémination artificielle avec l’aide de l’IGAD) et les croiser aux cochons locaux, plus rustiques mais surtout plus résistants à la chaleur et aux maladies. Aujourd’hui, après beaucoup de travail et de patience, les cochons de la Ferme du Paradis pèsent 250 kg. Les 60 truies destinées à la reproduction accouchent de deux portées annuelles de 12 à 15 cochonnets.«Au début, j’ai essayé d’élever aussi des canards, des lapins et même des moutons, mais c’est très compliqué de faire cohabiter tout ce petit monde. D’abord parce que les techniques d’élevage sont très différentes d’un animal à l’autre et qu’on ne peut pas les maîtriser toutes aussi bien. Ensuite, certains animaux apportent des maladies aux autres. Enfin, et surtout, cela demande des investissements très important pour chaque espèce élevée. C’est compliqué de gérer tout ça en restant rentable. Alors j’ai préféré me spécialiser dans les cochons et j’ai très vite abandonné les autres espèces.»Le résultat est convainquant : le “Label“ Jacky Cochon est reconnu pour la qualité de ses produits du terroir et la charcuterie Ikasa écoule la totalité de la production de la Ferme du Paradis.La SMAG, Société Meunière et Avicole du Gabon Avec ses 150 000 poules pondeuses, la SMAG est le plus gros producteur d’œufs au Gabon, fournissant les 2/3 de la consommation nationale.Fondée en 1969 par le groupe français Jean Louis Vilgrain, la SMAG a débuté ses activités au Gabon par l’agriculture et l’élevage. Petit à petit, la société s’est spécialisée dans les trois secteurs les plus porteurs : la minoterie, l’élevage de poules pondeuses et l’alimentation animale. Aujourd’hui, la SMAG produit 99% de la farine consommée au Gabon, par les particuliers, mais surtout dans les boulangeries et pâtisseries, et 3 200 000 œufs par mois.L’élevage de poules pondeuses est une activité très technique et demande beaucoup de soins pour rester rentable. L’investissement de départ est très lourd : achat de grands terrains, construction de bâtiments adaptés, achat et importation de poussins, formation de techniciens, nourriture pour des poules, qui ne commencent à pondre qu’au bout de 20 semaines, un œuf par jour au maximum, désinfection soigneuse et régulière des sites d’élevages, soins vétérinaires, transport et emballage des œufs... la liste des charges est très longue pour un œuf qui ne doit pas coûter plus de 100 F chez le détaillant final. Aussi, le rendement et la qualité de gestion des poules sont-ils primordiaux pour la viabilité d’un élevage industriel comme celui de la SMAG. Les œufs sont vendus frais et la production doit donc s’adapter à la demande des consommateurs. Une baisse des vente conduit à l’abattage de poules afin de ne pas avoir à nourrir des animaux dont on ne vendra pas la production mais qui continueront à manger chaque jour. Il faudra 3 mois pour revenir au volume de ponte maximum.Les œufs de la SMAG sont commercialisés à J+1, c’est-à-dire le lendemain de leur ponte. La date de production est inscrite sur l’emballage, afin de garantir au consommateur des produits toujours parfaitement frais.Mais avant d’arriver dans l’assiette du gourmet, le processus de fabrication est long et fastidieux. Chaque mois, la SMAG importe 14 000 poussins de France, par avion, tous de race Isa Brown, la souche la plus utilisée dans le monde, appréciée pour sa robustesse et la qualité de ses œufs. Placés dans l’une des 10 poussinières, ils vont y grandir tranquillement pendant 20 semaines, le temps d’arriver à maturité. À 20 semaines, les poules sont transférées dans un poulailler de ponte. Elles mettront encore 6 à 7 semaines avant de pondre un œuf par jour, leur rendement maximum, qui restera stable un certain temps avant de décroître doucement jusqu’à leur mort, 1 an plus tard environ. Durant toute la période de ponte, chaque poule mange environ 170 grammes de céréales par jour, doit être entretenue et soignée par un vétérinaire et vit dans un espace propre, quotidiennement désinfecté, afin d’éviter maladies et parasites. Les œufs sont automatiquement récoltés, dès leur ponte, pour être placés en alvéoles, ces plaques de carton bleues qui protègent les œufs de la casse, puis transportés au site de Lalala où ils seront marqués, emballés et conditionnés. Pour éviter la casse sur le trajet du site de production de Plaine-Nto à Nkoltang jusqu’au site d’emballage de Lalala, la SMAG refait régulièrement la route.La SMAG vends ses œufs à des grossistes qui les redistribuent ensuite à toute la chaîne commerciale, jusqu’à l’épicier de détail du quartier, chez qui l’œuf arrive dans les 48 heures après la ponte. Le processus est continu et demande une organisation minutieuse, du site de production au point de vente.La SMAG n’est pas le seul producteur d’œufs frais au Gabon, de nombreuses petites fermes plus artisanales se partageant le tiers restant du marché, ce qui représente tout de même le nombre non négligeable de 15 millions d’œufs par an. Avec son expérience et sa technicité, la SMAG est une source primordiale de conseils techniques pour ces petits producteurs.Produisant des aliments performants pour ses poules, la SMAG était apte a répondre à la demande d’éleveurs de produire aussi des aliments pour le bétail. C’est maintenant devenu sa troisième ressource avec 60 tonnes de farines et granulés par jour, aussi bien pour les volailles, que les cochons, les poissons, les lapins ou les chevaux. En fait, son unité de production est assez souple pour produire à la demande des aliments pour tous types d’animaux. Totalement renouvelée cette année, la jeune équipe dirigeante de la SMAG s’est fixée des objectifs ambitieux. Considérant que la consommation moyenne d’œufs par habitant est encore assez faible, les Gabonais ne mangent aujourd’hui, en moyenne, qu’un œuf par semaine, ce qui est très peu en comparaison d’autres pays, elle a mis en place une politique de développement de ses produits, appuyant par là même les autres producteurs qui devraient profiter de l’augmentation des ventes en résultant. D’autre part, le bénéfice des études en matière de soins et d’alimentation animales, destinées, dans un premier temps, à répondre aux besoins de rentabilité de son domaine avicole, est appliqué aux aliments développés pour êtres vendus aux éleveurs : il n’y a aucune différence entre la composition et les dosages des aliments vendus et ceux consommés par les poules de Nkoltang. Par ce biais, c’est toute la technicité de la SMAG qui est mise au service des éleveurs gabonais, ceux-ci disposant maintenant de véritables aliments performants, quelques soient les animaux qu’ils élèvent, produits sur place et donc immédiatement disponibles en quantités importantes.
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